19-08-2025 01:25 - Classement des entreprises de construction : un affichage sans garantie de résultats

Classement des entreprises de construction : un affichage sans garantie de résultats

Mauriweb - Le ministère de l’Habitat, de l’Urbanisme et de l’Aménagement du Territoire a annoncé, le 16 août, avoir procédé au classement de 255 entreprises opérant dans le secteur du bâtiment et des travaux publics.

L’opération, lancée en janvier 2024, a concerné aussi bien les entreprises spécialisées dans le bâtiment (124) que celles actives dans les réseaux d’eau (40), les forages (13), les barrages (8), l’assainissement (7), les routes (9), l’électricité (12) ou encore l’aménagement agricole (12).

Selon le communiqué officiel, toutes ces sociétés disposent désormais d’“attestations officielles” et de la capacité technique et financière requise pour exécuter des chantiers d’envergure. La tutelle met également en avant la création de 2 000 emplois techniques spécialisés, et promet une amélioration de la qualité des travaux ainsi que du respect des délais contractuels.

Une annonce qui interroge

Si, sur le papier, l’initiative paraît louable, elle soulève de sérieuses interrogations. Quelle méthodologie a été adoptée pour classer ces entreprises ? Quelles garanties offrent réellement ces attestations délivrées par le ministère ?

Dans un pays où les chantiers inachevés, les malfaçons criantes et les retards chroniques sont devenus monnaie courante, l’annonce officielle ressemble davantage à un exercice de communication qu’à une véritable rupture dans la gouvernance du secteur.

Le contraste avec la réalité du terrain

Sur le terrain, les constats sont têtus :

* Écoles et hôpitaux effondrés après quelques mois d’utilisation, révélant l’absence de contrôle sérieux des matériaux et des normes.

* Routes impraticables dès la première saison des pluies, malgré des budgets faramineux.

* Logements sociaux bâclés, livrés sans raccordements essentiels.

Dans ces conditions, le classement de 255 entreprises n’aura aucun impact réel tant que les mécanismes de contrôle, de sanction et de transparence ne seront pas appliqués de manière rigoureuse. La question fondamentale reste donc sans réponse : qui garantira la qualité et la durabilité des ouvrages ?

L’oubli des victimes et des usagers

L’annonce ministérielle insiste sur la création de 2 000 emplois, mais reste silencieuse sur les milliers de citoyens qui, chaque année, payent les conséquences directes des défaillances dans le secteur : victimes de l’effondrement de maisons fragiles, usagers d’axes routiers coupés par les crues, familles privées d’eau potable à cause de réseaux défectueux.

Une réforme à moitié faite

Si l’objectif affiché est de mettre de l’ordre dans le secteur, encore faut-il que ce classement ne soit pas un simple tampon bureaucratique, mais le point de départ d’un véritable assainissement. Cela implique :

* La publication transparente des critères de sélection.

* La mise en place d’un suivi public et indépendant des chantiers.

* Des sanctions effectives contre les entreprises défaillantes, quelles que soient leurs connexions politiques.

À défaut, cette réforme risque de rester une vitrine administrative, sans incidence sur le quotidien des Mauritaniens, et de s’ajouter à la longue liste des réformes proclamées mais jamais appliquées.





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Commentaires (2)

  • Hartaniya Firilile (H) 19/08/2025 08:40 X

    Dans les années précédant l'avènement militaro-affairiste, les entreprises se distinguaient par leur excellente qualité et étaient dirigées par d'éminents professionnels qui se livraient à une saine concurrence. On pouvait citer des sociétés et entreprises renommées jouissant d'une réputation établie dans toute la sous-région, telles que SAMACO TP, EGB, ERB, ERTP, SAMCO TP de Ghaddour, etc. Ces entreprises rivalisaient d'excellence tant par la qualité de leurs prestations que par l'embauche de cadres internationaux bénéficiant de rémunérations attractives et d'une vision technique qui faisait la fierté du secteur du bâtiment.

  • Hartaniya Firilile (H) 19/08/2025 08:40 X

    Aujourd'hui, la situation s'est considérablement dégradée. Certains vendent leur bétail pour créer une entreprise; d'autres, ayant un parent ministre désireux de conclure un marché avec son frère, sont invités à fonder une société en présentant de fausses réalisations. Des directeurs s'octroient des marchés après avoir créé opportunément une entreprise. Les travaux sont exécutés sans rigueur ni méthode, ne satisfaisant aucunement le client. Les généraux, les ministres et les commerçants possèdent désormais leurs propres sociétés, souvent fictives, dépourvues de personnel et, dans 95% des cas, même de bureaux. L'entreprise devient itinérante, avec un directeur incarnant à lui seul l'ensemble du personnel, compétent comme incompétent. Voilà ce que sont devenues les entreprises aujourd'hui en Mauritanie.